Déraillement de Montparnasse : l’histoire derrière les images incroyables du train qui a traversé un immeuble à Paris, 1895.H
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Ces photos incroyables de l’accident de la gare Montparnasse à Paris montrent une scène dramatique : un train a percuté le mur et s’est partiellement renversé dans la rue. La cause ? Une défaillance mécanique et une erreur humaine. Le train étant en retard, le conducteur l’a fait entrer en gare à grande vitesse. Il était équipé de deux types de freins : un frein à main et un frein à air comprimé, appelé frein Westinghouse. Le conducteur s’est rendu compte que le train roulait trop vite et a actionné le frein Westinghouse, mais sans succès. Découvrez l’histoire derrière ces images incroyables.
À première vue, ces photos ressemblent à des images tirées d’un vieux film catastrophe ou à un spectaculaire décor de parc d’attractions accueillant les visiteurs pour une nouvelle attraction insolite. Pourtant, ces images extraordinaires témoignent en réalité d’une tragédie bien réelle : le déraillement du Granville-Paris Express qui, le 22 octobre 1895, a fracassé la façade de la gare Montparnasse, blessant plusieurs contrôleurs ainsi qu’une poignée de passagers et coûtant la vie à une mère de deux enfants particulièrement malchanceuse.
Guillaume-Marie Pellerin avait passé une grande partie de sa vie à travailler sur les chemins de fer. Fort de ses 19 années d’expérience en ingénierie, l’Express était entre de bonnes mains. Lorsqu’il démarra les locomotives ce mardi matin fatidique et que le train quitta la gare de Granville à l’heure, rien ne laissait présager que le voyage se terminerait par l’une des catastrophes les plus tristement célèbres et les plus marquantes de l’histoire des transports.
Le trajet était relativement simple : environ 400 km séparant la station balnéaire de Granville, sur la côte bas-normande, de la gare de Paris-Montparnasse. Le train comprenait une locomotive à vapeur, trois fourgons à bagages, un wagon postal et six voitures de voyageurs. Aujourd’hui, le même trajet dure environ trois heures, mais en 1895, il en fallait plus de sept. Malgré un départ ponctuel, Pellerin et son équipe finirent par constater un retard de quelques minutes. Soucieux de respecter les délais, le conducteur prit la décision cruciale d’aborder Montparnasse à vitesse de croisière, attisant la pression jusqu’à ce que le train atteigne près de 60 km/h.
La gare en vue, Pellerin actionna le frein à air Westinghouse qui, malheureusement pour tous les participants, tomba en panne à ce moment précis. Le chef de train Albert Mariette, chargé de serrer le frein à main de secours de la locomotive, se retrouva temporairement indisponible, enseveli sous une montagne de documents en souffrance. N’ayant pas mesuré l’urgence de la situation avant qu’il ne soit trop tard, Mariette freina brusquement à quelques mètres du tampon et ne put que regarder avec horreur le train monter sur le quai, déraper sur 30 mètres à travers le hall de la gare avant de s’écraser sur la façade et de plonger sur 9 mètres jusqu’à la place de Rennes en contrebas.
Malgré les dégâts causés à la gare, la locomotive elle-même est restée en grande partie intacte et les six voitures voyageurs se sont immobilisées avant la façade détruite, ne laissant heureusement que quelques blessés légers, quelques valises écrasées et quelques chapeaux haut-de-forme renversés. Malheureusement, la seule victime de l’accident aurait normalement dû être loin des lieux. Marie-Augustine Aguilard, remplaçante de son mari vendeur de journaux, a été écrasée par un effondrement de maçonnerie alors qu’elle attendait son retour.
Une enquête sur la catastrophe aboutit à une accusation de 50 francs contre le mécanicien Pellerin pour excès de vitesse, tandis que Mariette, le conducteur, pour avoir omis de freiner à temps, fut également condamné à une lourde amende de 25 francs. Le train resta à l’endroit même où il s’était immobilisé pendant deux jours, le temps que l’enquête sur le déraillement soit en cours. Une première tentative de déplacement avec un attelage de quatorze chevaux se révéla infructueuse : dix hommes et un treuil de 250 tonnes furent finalement nécessaires pour descendre la locomotive égarée au sol, où elle fut transportée pour réparation et constatée comme ayant subi des dommages remarquablement minimes.
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Un article de journal sur l’incident. |
(via The Culture Trip )